La formation et l'apprentissage

Point sur la situation financière

Face à une situation financière fortement déficitaire, une offre devenue pléthorique et un niveau de contrôle à améliorer, une régulation du secteur se met en place. Regard sur les réformes en cours, avec Frédéric Travadon, Crowe Becouze.

Soyons positifs ! La loi « Avenir professionnel » de 2018 a contribué à la baisse du chômage, à l’emploi des jeunes et à l’insertion professionnelle des moins qualifiés (même si les bons profils restent les
premiers bénéficiaires du système !). D’autre part, l’élargissement et la libéralisation des offres ont favorisé le dynamisme du secteur, y compris au niveau des lycées pro, des universités, des chambres consulaires…
Tous ont dû se structurer sur le plan financier et comptable, s’inscrire dans une démarche concurrentielle, bref se professionnaliser. Cependant, on ne peut ignorer, ni l’impact financier de l’envolée du CPF, ni celui des vannes ouvertes sur l’apprentissage. Le business model du secteur est un vrai sujet !

Quelle est la situation ? 

France Compétences affiche 9,5 Mds de déficits cumulés de 2020 à 2022 (sur la base des résultats 2020 et 2021, et du budget rectificatif pour 2022, approuvé en novembre 2022, qui inclut 4 Mds de dotation exceptionnelle de l’Etat). Pour 2023, le déficit projeté est de 2,1 Mds, malgré une nouvelle dotation exceptionnelle de l’État de 1,596 Md et un report de crédit du PIC (Plan d’Investissement dans les Compétences) de 230 M. Cette situation critique peut s’expliquer par « l’année blanche » de la taxe d’apprentissage en 2019, et plus généralement par le nombre record de contrats d’apprentissage financés du fait des aides et des dispositions de financement très favorables, accordées et voulues par l’État.

Qu'est-ce qui va changer ? 

Du côté des entreprises, pas de retournement à court terme, puisque l’Etat garantit le bon fonctionnement des dispositifs et vient abonder les dettes de France Compétences.
Pour les bénéficiaires de CPF, les perspectives se resserrent, dans la mesure où un « reste à charge » a été instauré et devrait bientôt entrer en application. Mais ce sont les organismes de formation qui vont devoir supporter les nouvelles contraintes les plus marquantes.
En premier lieu, une baisse des prises en charges par l’Etat est annoncée, venant bouleverser l’économie du secteur. En second lieu, afin de vérifier la bonne utilisation des financements, le contrôle va être renforcé. Rappelons que celui-ci a été transféré par la loi de 2018 à France Compétences (qui ne disposait ni de l’historique, ni des moyens et prérogatives dont étaient fortes les régions, jusque-là). Quant aux OPCO, leur rôle de contrôle porte uniquement sur la forme : vérification de la conformité des dossiers.
Aujourd’hui, des contraintes plus fortes vont répondre à une exigence financière, notamment sur la remontée des données et sur la normalité par rapport aux indicateurs mis en place. D’ores et déjà, des audits de plus en plus nombreux et approfondis sont diligentés auprès des CFA, quand ils sortent des normes. Et la qualité des formations est elle aussi en ligne de mire (avec notamment Qualiopi).

Et sur le plan fiscal ? 

Depuis la collecte des contributions par l’Urssaf qui n’est pas assujettie à la TVA, c’est l’imbroglio, au niveau-même de Bercy ! Une mise au point s’impose, ne serait-ce que sous la pression européenne. Aujourd’hui, un dispositif très particulier à la France prévoit un mix entre des établissements publics ou privés, assujettis ou non aux impôts commerciaux dont la TVA, avec ou non subrogation de paiement par les OPCO. Une harmonisation et une clarification s’imposent.

La loi n° 2018-771 du 5 septembre 2018 pour la liberté de choisir son avenir professionnel prévoit dans son article 6 une obligation de certification, par un organisme tiers, des organismes réalisant des actions concourant au développement des compétences sur la base d’un référentiel national unique, s’ils veulent bénéficier de fonds publics ou mutualisés (financement par un opérateur de compétences, par la commission mentionnée à l’article L. 6323-17-6, par l’État, par les régions, par la Caisse des dépôts et consignations, par Pôle emploi ou par l’Agefiph).

En quoi consiste la marque "Qualiopi" ?

La marque « Qualiopi » vise à attester de la qualité du processus mis en oeuvre par les prestataires d’actions concourant au développement des compétences, et à permettre une plus grande lisibilité de l’offre de formation auprès des entreprises, des usagers et des financeurs.

Qui est concerné par la marque "Qualiopi" ? 

Au 1er janvier 2022, la certification qualité est obligatoire pour tous les prestataires d’actions concourant au développement des compétences qui souhaitent accéder aux fonds publics et mutualisés. La marque Qualiopi concerne donc tous les prestataires, y compris les formateurs indépendants, dispensant des actions de formation, de bilans de compétences, de validation des acquis de l’expérience et d’apprentissage.

Qui délivre la marque ? 

La marque « Qualiopi » est délivrée sur la base du référentiel national qualité, par des organismes certificateurs accrédités ou autorisés par le Comité français d’accréditation (Cofrac) :

AB Certification, ACTIVCERT, Afnor Certification,
Alpha Certif 12, ALTICERT, Apave Certification,
ATALIA Certification, BCS Certification,
Bureau de Certification international France,
Bureau Veritas Certification, CAPCERT, CCTA
Certification, Certifopac, Certi. Kôntrol, CertUp
Maïeutika, Ceva Solution, Cidées Certification,
Dauge Fideliance, DEKRA Certification,
Global Certification, GQC-Global Quality Cert,
HOFI Cert, I.Cert, ICPF & PSI, ISQ, Label
Qualité Système, LRQA France SAS, Proneo
Certification, QOANIX, Qualianor Certification,
Qualibat, Qualinow, Qualitia Certification, SGS
ICS, Socotec Certification

 

LE RÉFÉRENTIEL NATIONAL QUALITÉ

 

Ce référentiel est organisé autour de 7 critères qualité :

 

  • Conditions d’information du public sur les prestations proposées, les délais pour y accéder et les résultats obtenus.
  • Identification précise des objectifs des prestations proposées et l’adaptation de ces prestations aux publics bénéficiaires, lors de la conception des prestations.
  • Adaptation aux publics bénéficiaires des prestations et des modalités d’accueil, d’accompagnement, de suivi et d’évaluation mises en oeuvre.
  • Adéquation des moyens pédagogiques, techniques et d’encadrement aux prestations mises en oeuvre.
  • Qualification et développement des connaissances et compétences des personnels chargés de mettre en oeuvre les prestations.
  • Inscription et investissement du prestataire dans son environnement professionnel.
  • Recueil et prise en compte des appréciations et des réclamations formulées par les parties prenantes aux prestations délivrées.

Pour chacun des 7 critères, le référentiel précise les indicateurs à mettre en oeuvre, en fonction de la catégorie d’action concernée (action de formation, bilan de compétence, VAE, formation par apprentissage).

Sources : magazine connexions N°26 par Frédéric Travadon, Crowe Becouze du réseau Crowe France